Art de la permanence, l’architecture incarne l’État à
travers la matérialisation de ses valeurs…
Quelles parties de l’édifice assurent la permanence ?
Quels espaces en seront rendus flexibles à l’évolution de
leurs fonctions ?
Dilater
La responsabilité
première de l’architecte consiste à réussir à dilater l’espace. C’est une
mission concrète ayant une influence directe sur la matérialité objet de son
travail et dont l’enjeu primordial nous semble être la mise en valeur des
opacités et des transparences par un dosage pertinent de la lumière.
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Ce concept de dilatation, spatial
et concret, peut également être compris au sens spirituel ; il prend
alors l’aura abstrait des valeurs sémantiquement profondes qui confèrent un
statut, telles qu’ouvrir, épanouir, développer ; l’architecture devenant
ainsi une qualification positive de l’environnement construit par l’homme.
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Définir
Alors que l’on
assiste aujourd’hui à un engouement évident des décideurs publics pour l’architecture,
il convient, pour les architectes, d’y répondre en développant les potentialités
de cette situation. Premièrement, il nous semble important de cerner, même
brièvement, la discipline architecturale, parce que l’architecture est
parcourue de dualités qui rendent une définition commune difficile à obtenir.
Relevant – à la fois – de l’abri et du
lieu
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signifiant, de la technique et de
l’art, de l’usage et de l’émotion, l’architecture possède cependant des
traits pertinents qui la distinguent des autres disciplines qui concourent
avec elle à l’acte de bâtir. La Renaissance en offrait une définition dont la
justesse nous frappe encore : méditation
de l’usage. Nous pourrions ajouter que l’architecture, art de la
permanence, est inséparable de l’idée d’amélioration de l’environnement
humain et son objectif est d’émouvoir.
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Transcender
L’architecture fut
inventée pour élever, distinguer ou honorer le passage de l’homme sur terre.
Il est donc évident que cette discipline est capable de qualifier des
constructions pour qu’elles représentent aussi des valeurs d’une société.
Elle incarne l’État à travers la matérialisation de ses institutions.
L’architecture est une affaire sérieuse
Pour satisfaire les
exigences humaines sans se contenter de répondre aux besoins exprimés, le
travail d’architecture doit procéder d’une réflexion préalable dans laquelle
il puise le sens nécessaire à sa validité.
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Ainsi, nous pensons
que, outre la connaissance, le savoir disciplinaire et la culture, l’architecte
doit posséder une morale, une attitude ou des valeurs qui le situent dans la
société où il vit.
Le danger qui le guette, lorsqu’il
est confronté à la demande publique, c’est de vouloir reproduire des
attitudes soit commerciales, soit médiatiques, où la concurrence ou la
recherche du « scoop », forcent à la recherche constante de
nouveauté ou de l’arbitraire qui frappe fort, attitudes qui vont à l’encontre
des résultats de la discipline, une haute performance sociale et la
permanence de l’œuvre.
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Aujourd’hui
Nous sommes à
présent confrontés à une situation culturelle qui rend le travail sur l’architecture
publique plus difficile. La perception de valeurs se trouve « brouillée »
par une tendance dominante de refus des critères intemporels du bien, du
vrai, du beau. Nous vivons un monde où la frontière entre la culture et le
divertissement, voire le spectacle, s’est estompée, où l’on confond, aussi
bien la technologie que le changement, avec le progrès. Or, l’État a besoin d’une
certaine stabilité des valeurs pour que celles-
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ci puissent être transcendées en
architecture signifiante.
Si l’immobilisme pouvait devenir
porteur d’évolution positive, nous serions en droit de rester inactifs. Mais
le risque est grand de voir l’évolution aggraver la situation : il n’est
pas possible d’attendre que le brouillard idéologique se dissipe pour assumer
notre responsabilité, chacun dans sa spécificité. Il faut réfléchir aux
programmes tels qu’ils sont, vont devenir, ou devraient être, et il faut
réfléchir aux édifices eux-mêmes.
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Programmer
Parce que toutes les
parties d’un édifice ne relèvent pas de la même importance, voire d’une
pérennité unique… parce que, dans l’acte de construire la technique n’a plus
d’obstacle majeur à négocier, il est nécessaire de soumettre tout nouveau
programme d’édifice public au test de la permanence/obsolescence. Ce test
permet de déceler quelles sont les parties d’un équipement qui détiennent la
clef de son identité, là où la permanence doit être assurée. Et les
distinguer des parties de programme qui peuvent être rendues obsolètes par un
usage en constante évolution. Les termes de « typique » et « a-typique »
ont été trouvés pour distinguer ces deux situations spatiales dans un
édifice.
Le « typique »
et « l’a-typique » cohabitent dans tout programme d’équipement. Constatons
au départ qu’un programme possède des espaces dont la qualification spatiale
est très particulière à son usage : la forme est souvent la réponse à
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la fonction qui s’y déroule. Ce sont les espaces propres du type
de programme, d’où l’appellation de « typique ». À long terme, ces
espaces pourraient devenir obsolètes. Ils devraient être conçus en ce sens,
de sorte que leur démolition éventuelle épargne les zones permanentes de l’édifice.
A l’opposé, nous trouvons des espaces où la configuration volumétrique peut,
sans heurter l’usage, procéder à l’accommodation individuelle : la fonction suit la forme. Il s’agit
de l’« a-typique ». Ces espaces sont voués à une plus grande
permanence, puisque véritablement polyvalents. Ils sont, de droit,
prioritaires dans le rapport de l’édifice à la ville. Il est aisé de voir
comment, suivant le programme, la part de l’un ou de l’autre peut se voir
élargie ou réduite. Une réflexion menée sous ces termes permettrait d’aboutir
à des immeubles véritablement flexibles sans pour autant négliger le visible
dont on fait les villes.
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Demain
Ces quelques idées
nous permet-traient d’aborder le nécessaire travail préalable, un travail
collectif où l’on pourrait élucider progressivement, et intégrer, l’évolution
tant de la technique que des valeurs pour que l’on puisse retrouver dans le
travail d’architecture
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la dignité qui doit le
caractériser. Il en résulterait une architecture qui porte en elle autant les
qualités de permanence qui la représentent et représentent les institutions
qu’elle incarne, que la capacité d’intégrer les nécessaires évolutions d’une
société en devenir.
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Ce texte fut publié dans le numéro 155 de la revue ADMINISTRATION, d’avril-juin 1992, revue d’étude
et d’information publiée par l’Association du corps préfectoral et des hauts
fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur. Le titre du numéro était L’ÉTAT
PROPRIÉTAIRE IMMOBILIER Dépôt légal : mai 1992 – no 16049
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