Plan Voisin Paris 1925
La pensée de Le Corbusier se situe à une époque historique précise, l’époque héroïque de l’entre-deux-guerres, dont l’enthousiasme débridé, l’ambition esthétique et la foi sans faille dans le progrès sont les caractéristiques majeures. Tout dans l’époque actuelle s’y oppose.
Les
principes
d’urbanisme de Le Corbusier –La Charte d’Athènes– étaient
des efforts pour rationaliser les activités humaines dans le but
d’éclairer la
pensée urbaine afin de résoudre des problèmes tels l’hygiène (horreur
des rues corridor rendues responsables des maladies), le mitage du
territoire, etc.
en introduisant dans le projet une vie nouvelle, la paix acquise, le
confort du
sport et des loisirs retrouvés.
Ces
principes simples furent détournes par l’avidité des intérêts économiques
s’emparant de cette esthétique de la nudité à laquelle fut enlevée toute la
générosité spatiale (voir l’immeuble –villas ou « une maison, un
palais »).
Pavillon de l'Esprit nouveau Paris, 1924
Pavillon de l'Esprit nouveau Paris, 1924
Ce que nous devons conserver de l’héritage de Corbu, c’est sa foi, sa capacité à créer un projet unique pour une architecture où se mêlent avec la même intensité l’idéologie, l’ergonomie, le confort humain et la technologie, et aussi la grande cohérence projectuelle, malgré le passage d’une esthétique machiniste lisse et blanche â celle, plus organique intemporelle et plastique qu’il développe après la deuxième guerre mondiale. Son discours --son langage architectural-- d’une continuité sans faille, lui permet de créer des prototypes pour la ville verticale en faisant du logement le générateur des morphologies urbaines modernes.
Ce n’est
pas sa pensée qui fait des dégâts mais son détournement, c’est surtout que sa
pensée est tombée dans les mains de gens sans scrupules ni talent.
On lui
attribue la théorie de la tabula rasa –pour ses plans qui installèrent des systèmes
de Gratte–ciels dans le centre de Paris. Le problème c’est que c’était la ville
idéale du XIXe. En démolissant on arrive à tout et son contraire. Car si l’on
prend le Londres d’aujourd’hui qui possède dans son centre une collection de
tours sans aucune harmonie, sans aucune amitié ni désir de partage entre elles
on voit la différence avec Rotterdam où l’on a réellement pratiqué la tabula
rasa, où nous avons un bon exemple de ville moderne réussie. Je pense que
c’est en s’appuyant sur une ville comme Paris que Corbu sut attirer l’attention
de ses contemporains vers l’urbanisme moderne, par sa transgression, par sa
rupture avec la ville du passé, par sa force, son idéal…et surtout par sa
nouveauté.
Aujourd’hui,
ses détracteurs ne cherchent qu’à se faire remarquer car ils ne peuvent ni
incarner une nouvelle pensée urbaine ni faire preuve d’une grande créativité.
C’est par leur opposition à Corbu qu’ils trouvent un écho médiatique.
H.Ciriani décembre 2005
Ce texte, commandé par Michèle
Champenois, fut écrit pour figurer dans un supplément du Monde. Les illustrations ont été ajoutés pour le blog